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Gestion du stress et mieux-être: ce que dit la science




Dans l’ère des polycrises que l’on traverse notamment depuis le début de l’année 2020 et compte tenu des sombres perspectives avant tout liées aux effets du dérèglement climatique, comment ne pas sombrer dans le désespoir !


Pour ne pas désespérer, on peut être tentés d’avoir recours à différents réducteurs d’angoisse : le déni et la fuite dans la société de consommation, de loisirs et de divertissement, diverses formes d’addictions, la radicalisation idéologique, les intégrismes religieux, le conspirationnisme…. A l’évidence, ce n’est pas une solution car ce recours apparaît nuisible tant pour soi, que pour la société et sa stabilité et même pour la planète et sa viabilité.


Alors que faire ? Il convient plutôt de s’appuyer sur un certain nombre de valeurs-refuge dans une logique de rassurance qui passent tout simplement par un retour aux "fondamentaux" humains dans une période souvent caractérisée, d’un côté, par une "anthropophobie", ou la "haine de l’humanité" (Gérald Bronner) jugée intrinsèquement nuisible, notamment pour la planète, et, de l’autre, par la soi-disant "obsolescence programmée" de l’humain par l’Intelligence artificielle.


Or, ce "back to basics" de l’humain, qui est avant tout un mammifère social (coopération, amitié, altruisme, optimisme…), est validé par la science, ainsi que le montrent différentes études scientifiques publiées ces derniers mois et réside principalement dans le fait d’avoir une relation saine à soi-même, à l’autre, à la nature et au monde.

Comment bien gérer son stress et même envisager un mieux-être à l’ère des polycrises, voici ce qu’en dit la science.



(1) Il fait bon vieillir


Une étude publiée dans la revue Frontiers in Behavioural Neuroscience ("Oxytocin Release Increases With Age and Is Associated With Life Satisfaction and Prosocial Behaviors") montre que l'on tend à devenir plus gentil en vieillissant. Ceci serait largement lié à une augmentation des niveaux d'ocytocine, l’hormone du bien-être, à mesure que nous vieillissons, alors que celle-ci est connue pour avoir une influence sur la confiance, l'altruisme, la charité et la générosité.


Orb Media montre, sur la base d’études scientifiques et de l’analyse de données, l’existence d’un lien entre la manière dont les individus perçoivent la vieillesse et la façon dont ils vieillissent. Les personnes qui ont une attitude positive envers la vieillesse sont ainsi susceptibles de vivre plus longtemps et en meilleure santé que celles ayant une attitude négative. Et ceux qui ont une vision négative du vieillissement sont plus susceptibles de subir une crise cardiaque, un accident vasculaire cérébral ou de mourir de façon prématurée. De même, les personnes âgées dans les pays où les niveaux de respect envers les seniors sont faibles sont exposées à un risque de détérioration de leur santé mentale et physique et à des niveaux de pauvreté plus élevés. Un simple changement d'attitude, selon la recherche, pourrait donc beaucoup améliorer leur situation.


La psychologue Susan Turk Charles de l'université de Californie à Irvine montre dans ses études que, si les corps perdent de leur vigueur avec l'âge, ce n'est pas le cas sur le plan émotionnel où l'on n'observe pas de déclin et où la régulation des émotions tend même plutôt à s’améliorer. En 2010, dans un article co-écrit avec Laura Castensen dans l’Annual Review of Psychology, les auteures constataient qu’en moyenne, les personnes âgées avaient des contacts sociaux plus satisfaisants et faisaient état d’un bien-être émotionnel plus élevé. Cela a été confirmé par d’autres études plus récemment.


Le professeur d’anthropologie Michael Gurven de l'université de Californie à Santa Barbara aux Etats-Unis et son équipe ont montré dans une étude publiée dans Proceedings of the National Academy of Sciences que ce qui distingue les humains des autres espèces animales est la coopération entre toutes les générations et donc le rôle spécifique joué par les générations âgées. Ils se sont demandés, en effet, pour quelles raisons les humains survivent bien plus longtemps que les autres espèces lorsqu’ils ne sont plus fertiles, ce qui tend à contredire la théorie de l’évolution selon laquelle les corps dépérissent lorsqu’ils ne sont plus féconds, et par conséquent à quoi sert cette "véritable étape de la vie post-reproductive" (Michael Gurven). Les chercheurs en concluent que les humains qui ont dépassé l’âge de procréer ont un rôle très important pour l’espèce. Les grands-parents ont, d’après eux, déterminé les chances de succès de l’espèce humaine pendant des millions d’années par la recherche et le partage de nourritures, l’accroissement du taux de survie des parents, la transmission aux jeunes de compétences, de visions du monde et de la manière de se socialiser. Ce qui fait la différence par rapport aux autres espèces animales réside donc dans la coopération entre toutes les générations. Michael Gurven en tire la conclusion selon laquelle "il est temps de réfléchir sérieusement à la façon de reconnecter les générations et d’exploiter une partie de cette sagesse et de cette expertise des aînés".



(2) La coopération face au danger


L'étude par une équipe de chercheurs français (neuroscientifiques et psychologues sociaux) des témoignages de 32 victimes de l’attentat du Bataclan de 2015 parue dans la revue Plos One ("Nature and determinants of social actions during a mass shooting") montre que ce qui a dominé dans ce contexte dramatique, ce sont les actes de solidarité et de coopération, et non le chacun pour soi. Ces résultats confirment ceux d’autres travaux menés sur les attentats de Londres en 2005 ou du 11 septembre 2001 aux États-Unis, ou encore ce qui ressort des témoignages sur le naufrage du Titanic par exemple. Comme l’explique Guillaume Dezecache, maître de conférences en psychologie de l’université de Clermont Auvergne et auteur principal de l’étude, "Il existe une idée assez prégnante, assez toxique, que face à un danger, les liens sociaux disparaîtraient au profit du chacun pour soi. La littérature scientifique montre que ce n’est pas du tout le cas. Lors des attentats contre le World Trade center, en 2001, il y a eu au contraire du chacun pour tous". Il en conclut que "Dans un contexte où les catastrophes naturelles vont devenir extrêmement fréquentes, où il va y avoir une raréfaction de certaines ressources, la question, c’est plus largement : est-ce qu’on ne peut pas être un peu plus optimiste sur la réaction humaine face aux catastrophes ? Nous sommes des mammifères sociaux. Et rien ne fait plus peur à un mammifère social que de se trouver seul face au danger. Dans ce cas, la motivation la plus forte, c’est une motivation affiliative. De trouver quelqu’un avec qui on peut se sentir proche. On a besoin des autres, c’est ce que révèle ce genre de situation".



(3) Les bienfaits de la gentillesse et de l’altruisme


L’altruisme nous fait du bien car aider l'autre, c’est s’aider soi. Le chercheur en psychologie sociale Christophe Haag explique ainsi que "face à cette sinistrose ambiante, un des meilleurs remèdes pour réguler ses états émotionnels est d’aider les autres". C’est ce qu’explique également le neuroscientifique Christophe Rodo : "des études tendent à montrer que certaines régions du cortex préfrontal sont modifiées lorsque l'on fait une action positive. Cela participe vraisemblablement à la libération de certaines molécules comme la dopamine, liée aux sensations de plaisir". D’après Christophe Haag, les personnes qui ont l’habitude de se tourner vers l'autre en produisant des actes bienveillants, sécréteraient même 23% moins de cortisol - l'hormone du stress - que les autres et plus d’ocytocine (voir plus haut). Au final, l’altruiste aurait ainsi une espérance de vie plus élevée en ayant une meilleure santé physique et mentale.


Daniel M. T. Fessler, professeur d’anthropologie à l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), étudie les effets de la gentillesse. Il dirige notamment le UCLA Bedari Kindness Institute (https://kindness.ucla.edu/), dédié à "la recherche, l’éducation et la pratique de la bienveillance dans l’objectif de permettre aux citoyens et aux décideurs d’investir dans la construction de sociétés plus humaines". Pour lui, "Les preuves que la gentillesse favorise le bien-être mental et physique sont énormes". Il raconte à ce propos l’étonnante expérience suivante relative à la notion d’élévation, à savoir "le sentiment qu’on éprouve en voyant d’autres personnes se comporter de manière exemplaire et morale" : "nous avons montré à la moitié des participantes et participants une vidéo dans laquelle un jeune homme aide de nombreuses personnes : il donne de l’argent à une mendiante, il aide une vendeuse de rue à pousser sa brouette sur le trottoir, il nourrit un chien errant, il offre à manger à une voisine âgée. L’autre moitié des participantes et participants a visionné une vidéo d’un jeune homme effectuant un parcours de gymnastique urbaine. Les deux sont des comportements inhabituels […]. Mais l’un est altruiste, l’autre non. Nous avons ensuite demandé aux participantes et participants de décrire leurs sentiments, puis nous les avons payés en espèces pour leur participation. Le responsable de l’étude leur a ensuite donné une enveloppe et leur a dit : "Je vais me retourner et, si vous voulez, vous pouvez mettre une partie de votre paiement dans l’enveloppe et l’envoyer ainsi à un hôpital pour enfants". Nous avons donc pu mesurer ici un résultat direct d’élévation : comment les gens se sont-ils sentis après chaque vidéo et combien d’argent ont-ils versé ?". Résultat, "Plus tard, lorsque les données de l’expérience sont arrivées, mon collègue a dit que nous avions un problème de comptabilité, que quelque chose n’allait pas : certains des paiements reçus étaient plus élevés que l’argent que nous avions donné aux participantes et participants en espèces. Mais ce n’était pas une erreur : les gens avaient simplement ouvert leur propre porte-monnaie et donné plus que ce qu’ils avaient reçu de nous". Même si cela ne veut pas dire qu’il suffit de regarder une vidéo pour s’élever, Daniel M. T. Fessler en conclut tout de même que "Si vous voulez être en bonne santé, vous avez plus intérêt à être gentil qu’à être riche".



(4) De la nécessité d’être optimiste


Nombreuses sont les études qui ont montré que l’optimisme a un impact positif sur la santé: meilleure santé cardiaque ou pulmonaire, système immunitaire renforcé, plus faible risque de mortalité...


En 2021, une étude publiée dans The Journals of Gerontology s’est appuyée sur une expérience menée par des chercheurs de l’université hébraïque de Jérusalem qui a consisté à suivre quelque 1 200 personnes âgées (nées en 1920 et 1921) pendant plus de 30 ans. Les conclusions des chercheurs sont que l’optimisme contribue à rallonger l’espérance de vie et a "un impact sur la survie" ainsi que l’affirme Yoram Maaravi, l’un des auteurs de l’étude.


Une autre étude, parue cette fois en 2022 dans le Journal of American Geriatrics Society confirme à quel point l’optimisme a un impact positif sur la santé mentale et physique. Cette étude basée sur un échantillon de près de 160 000 femmes d’origines et de milieux sociaux différents montre que celles qui ont un degré élevé d’optimisme ont une espérance de vie plus longue et de plus grandes chances de vivre plus de 90 ans. Cela s’expliquerait tout d’abord par le fait que l’optimisme est "lié à une alimentation saine, à la pratique d’une activité physique et au fait d’être moins enclin à fumer", facteurs favorisant une meilleure santé. Mais cela semble être aussi lié à la façon de gérer le stress, les optimistes ayant tendance à affronter une situation stressante de front et donc à moins souffrir des réactions biologiques négatives provoquées par le stress.



(5) La main verte


Une grosse étude impliquant plus de 500 000 Britanniques a montré que la cuisine, le nettoyage et le jardinage pouvaient être liés à la réduction du risque de développer la maladie d'Alzheimer.


Différentes études ont montré que la pratique du jardinage a de multiples bienfaits : celui-ci permet de réduire le niveau de stress, de renforcer la confiance et l'estime de soi, et de se couper de l’isolement (si le jardinage est pratiqué dans un jardin communautaire).



(6) L’art-thérapie


Les psychiatres de Bruxelles peuvent désormais prescrire des visites gratuites de lieux culturels dans le cadre d'un programme pilote, en complément d’autres traitements, pour des patients souffrant de dépression, de stress ou d'anxiété. Cette expérience s’inspire de ce qui se pratique également au Canada depuis 2018. L’objectif n’est bien évidemment pas de remplacer un médicament, mais comme le dit le professeur Kornreich : "C’est un outil supplémentaire pour reprendre pied dans la vie, au même titre que l’activité physique ou voir des gens".


Une étude menée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2019 indiquait déjà que les arts pouvaient aider les personnes souffrant de maladies mentales et appelait à une meilleure coopération entre les professionnels de la culture et de la santé publique.



(7) Le besoin de nature


Une étude de chercheurs de l’Institut de santé globale de Barcelone parue dans la revue Environmental Research tend à confirmer les effets sur la santé mentale de la règle dite des "3-30-300" : voir au moins 3 arbres depuis son logement, vivre dans un quartier avec une couverture arborée de 30 % et à 300 mètres d'un parc ou d’une forêt. Cette étude réalisée auprès de 3 145 Barcelonais montre qu’une simple exposition à un espace de verdure près de son lieu de résidence est "significativement associée à une meilleure santé mentale, à une baisse de consommation d’antidépresseurs et à moins de visites de psychologues ou de psychiatres".


Une autre étude du Finnish Institute for Health and Welfare montre que le fait de visiter la nature entre 3 et 4 fois par semaine peut réduire d’un tiers le risque d'avoir besoin de médicaments contre l'anxiété ou la dépression.


Une étude du King’s College de Londres menée pendant trois ans indique que la présence d'oiseaux contribue à améliorer notre bien-être mental, même huit heures après les avoir entendus.



(8) Partager un repas


Une étude de l’American Heart Association (AHA) a montré que partager des repas avec d'autres (famille, amis, voisins, collègues de travail) était un excellent moyen de réduire le stress, de renforcer l'estime de soi et d'améliorer les liens sociaux.



(9) Friends


Plusieurs études montrent que passer du temps avec ses amis tend à améliorer sa santé, tant mentale que physique. L’amitié semble même influencer notre réponse immunologique comme l’ont montré les résultats d’une étude étonnante menée en 1997 : 276 personnes en bonne santé ont reçu des gouttes nasales porteuses d'un virus du rhume. Or, les personnes ayant un large réseau social étaient moins susceptibles de s’enrhumer. En définitive, un important réseau social contribuerait ainsi à réduire le risque d’une mort prématurée bien davantage que l’exercice physique ou le régime alimentaire. Cet impact positif de l’amitié sur la santé est lié en particulier au fait que les amis peuvent nous aider à gérer des situations de stress.


Une étude récente parue dans Sage Journals observant les relations amicales de plus de 900 volontaires révèle qu’une seule conversation (en face à face) dans la journée avec un ou une ami(e) suffisait à influencer positivement leur bien-être.



(10) Le voyage


Des chercheurs de l’Université Edith-Cowan en Australie ont montré dans une étude parue dans Tourism Management que les voyages peuvent agir comme thérapie pour les personnes atteintes de troubles mentaux. Ceci s’expliquerait par le fait que la découverte de nouveaux lieux, de nouvelles expériences, une activité physique telle que la marche, les échanges sociaux ou bien la nature, le soleil et l’air frais favoriseraient leur bien-être mental.

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