A l’évidence, la période que l’on traverse est dramatique et très inquiétante avec des guerres dévastatrices, en Ukraine, à Gaza, au Liban, au Soudan et ailleurs, la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes, les tensions de plus en plus manifestes entre la Chine et Taiwan ou bien entre les deux Corées, la violence croissante de la criminalité organisée autour du trafic de drogue, la montée un peu partout en Europe de la droite populiste, la perspective de voir Donald Trump revenir à la Maison Blanche…
C’est dans ce type de période qu’il paraît crucial de conserver et même de cultiver autant que possible un état d’esprit positif afin de ne pas sombrer dans un pessimisme outrancier. Mais c’est tout de même loin d’être évident en ce moment.
Deux initiatives positives : a-t-on encore les moyens d’être pessimistes ?
Deux initiatives positives récentes paraissent être ainsi particulièrement les bienvenues en la matière en nous incitant à rester optimistes dans une période où l’actualité est particulièrement dramatique.
La première est portée par la société de Conseil PwC, qui a lancé fin septembre une "Mobilisation pour l’optimisme" en posant la question suivante: "A-t-on encore les moyens d’être pessimistes ?".
Après le succès des Jeux olympiques et paralympiques, PwC estime que "nous vivons un moment décisif pour transformer l’essai en pérennisant le sursaut d’optimisme des Français" en proposant d’explorer "les opportunités de reprendre confiance durablement". Cela se traduit par l’organisation de débats et de rencontres dans les mois à venir (voir le programme ici).
La seconde initiative est le forum World in Progress, qui a été organisé à Barcelone les 14 et 15 octobre dernier par le groupe de presse Prisa (El Pais).
Son objectif était d’être un "catalyseur de changement" en promouvant "l’échange tout en favorisant la collaboration autour de solutions ayant un impact tangible". Ces deux jours de conférences ont réuni des personnalités politiques, des intellectuels et des dirigeants d’entreprises autour de trois grandes thématiques : (1) la gouvernance géopolitique et l’érosion de la démocratie, (2) l’avenir de l’industrie et (3) le dérèglement climatique. Une synthèse en anglais des principales interventions est consultable ici.
Le célèbre psychologue Steven Pinker a clôturé ces 2 jours de conférences par une intervention visant à inciter le public à rester optimiste. L’Observatoire du Positif a réalisé une synthèse de cette intervention que l’on peut retrouver ici.
Et si les Français n'étaient pas aussi pessimistes que cela
C’est devenu désormais un cliché : les Français sont dorénavant connus pour être particulièrement pessimistes, du moins pour ce qui concerne l’avenir de leurs enfants, du pays et même de la planète.
C’est ce qu’ont montré encore une fois les résultats d’enquêtes qui ont été récemment publiées. Seuls 48 % des Français sondés se disaient ainsi optimistes pour l’avenir de leurs enfants dans une enquête réalisée par Ipsos, 35 % l’étaient pour l’avenir de la France et 32 % pour l’avenir de la planète et de la nature. 26 % d’entre eux se disent même très pessimistes pour l’avenir de la France et 27 %, pour l’avenir de la planète et de la nature.
D’après une autre enquête Ipsos récente, 64 % des Français interrogés "aimeraient que leur pays redevienne comme autrefois". Ce chiffre est même en hausse de huit points depuis dix ans, ce qui est beaucoup plus élevé que pour les individus sondés dans d’autres pays.
Doit-on en tirer la conclusion selon laquelle les Français sont foncièrement et irrémédiablement pessimistes ?
En fait, c’est un peu plus compliqué que cela. Les Français tendent ainsi à se montrer plutôt optimistes sur le plan personnel. Les sondages montrent généralement l’existence d’un décalage notable entre leur vision pessimiste de l’avenir collectif et leur optimisme relatif à leur avenir personnel.
Ainsi, dans l’enquête Ipsos vue plus haut, 63 % des sondés se disent optimistes pour leur propre avenir. Ils étaient donc à peu près deux fois plus nombreux à se montrer optimistes à titre personnel qu’à titre collectif. Dans une autre enquête OpinionWay consacrée aux Français et à l’optimisme, on retrouve ce même clivage entre, d’un côté, un pessimisme concernant le pays et, de l’autre, un optimisme majoritaire à un échelon individuel puisque 74 % des Français interrogés se disent optimistes dans leur vie de tous les jours.
Dans cette même enquête, qui présente l’avantage de poser des questions assez inhabituelles autour de l’optimisme, on peut voir que les Français considèrent qu’il est important d’être optimiste, que l’on peut être optimiste à tout âge, que l’optimisme est bon en premier lieu pour la santé mentale et qu’il présente bien d’autres avantages.
Ainsi, l’idée selon laquelle il est important de rester optimiste dans la vie fait quasiment l’unanimité : 95% des personnes interrogées la partagent. Cette idée est partagée par l’ensemble des catégories, y compris par... les pessimistes.
Pour les Français sondés, il est important de rester optimiste d’abord pour maintenir une bonne santé mentale (82 %), puis pour rester motivé dans ses projets (63 %) et pour améliorer ses relations sociales (40 %).
83 % des Français interrogés estiment tout autant qu’il n’y a pas de corrélation entre âge et optimisme et qu’on peut donc être optimiste à tout âge. Ce sont d’ailleurs les 65 ans et plus qui sont les plus nombreux à partager ce point de vue.
Enfin, l’optimisme présente de nombreux avantages aux yeux des personnes sondées, en particulier de permettre de relever plus facilement les défis auxquels on est confronté (93 %), de faciliter l’adaptation au changement (91 %), d’être un moteur pour faire changer les choses (90 %) ou de favoriser la coopération (89 %).
Ce qui incite les Français à se montrer optimistes, ce sont en premier lieu les améliorations de la santé (progrès médicaux, espérance de vie, baisse de la mortalité) et deux types d’acteurs, les chercheurs/enseignants et les Français en général (eux-mêmes/les jeunes/les citoyens).
Pour les Français sondés, les raisons de rester optimistes aujourd’hui sont d’abord, en effet, les progrès réalisés en matière de santé (51 %), la hausse de l’espérance de vie (33 %), l’accès à l’éducation (24 %), les progrès technologiques (22 %) et la baisse de la mortalité (21 %).
Les acteurs qui incitent le plus les Français à être optimistes sont eux-mêmes (80 %), les chercheurs (78 %), puis les jeunes (59 %), les enseignants (58 %), les ONG (57 %) et les citoyens (56 %). Arrivent en queue de peloton les journalistes (29 %) et les dirigeants politiques. Pour les Français, ce sont à peu près les mêmes acteurs qui doivent faire preuve d’optimisme : eux-mêmes, les chercheurs, les enseignants et les jeunes. Au-delà, ils sont une majorité à estimer que tous les acteurs doivent faire preuve d’optimisme.
Enfin, même si les Français se montrent pessimistes pour les cinq ans à venir et inquiets à propos du changement climatique et des tensions géopolitiques internationales, ils sont tout de même 76 % à estimer malgré tout que l’on peut encore s’autoriser à rester optimistes.
Alors, autorisons-nous à être optimistes !
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